Début de mission (Saphira)

Jon Snow, envoyé par le général Roran de l'armée libre, vêtu en civil et accompagné de son loup albinos, Fantôme, entra dans la ville d'Aberon par la grande porte. Il avait pour mission de surveiller de près les agissements du prince Gabriel et, pour ce faire, le mieux était de commencer par le rechercher dans la capitale du Surda. Il savait à peu près à quoi il ressemblait pour avoir entendu sa description par-ci par là entre les autres soldats et ce qu'il entendait depuis son arrivée dans la ville. Il n'était pas question pour lui d'approcher ouvertement son homme, ses ordres étaient simplement de surveiller ses faits et gestes pour le compte de l'armée libre. Ils entrèrent dans une auberge dans laquelle il se rendit auprès du gérant afin de prendre une chambre pour la nuit. Il savait que c'était un millitaire à la retraite qui tenait cette auberge.

-Salut Edd. Apostropha-t-il l'aubergiste. Ce dernier releva la tête et le reconnut.

-Eh bien ça alors, Jon Snow, pour une surprise s'en est une belle.

-Content de te voir aussi l'ami.

-Alors, quel bon vent t'amène à Aberon ?

-L'envie de revoir un vieil ami, et une mission.

-Oh, toujours dans le business. Au fait, comment va ce bon vieux Syrio ?

Le visage de Jon s'assombrit, il n'avait pas encore complètement fait le deuil de son maitre d'armes et cela suffirait sans doute à faire comprendre à Edd qu'il n'était plus.

-Oh...Désolé, je n'aurais pas du parler de lui.

-Tu n'as rien à te reprocher, tu ne pouvais pas savoir. Et il faudra bien qu'un jour je m'y fasse.

-Jon...Pour cette nuit je peux t'offrir la chambre.

-Je ne veux pas de ta pitié Edd, je peux payer ma chambre comme tout le monde.

-Ce n'est pas de la pitié, c'est du soutien envers un ami. Je suis sûr que tu aurais fait de même à ma place.

-Sûrement...

-Il t'aimait comme son propre fils, mais tu le sais déjà. C'est bien la moindre des choses que je puisse faire pour honorer sa mémoire.

Jon pleurait intérieurement, cela devait se voir à ses yeux. Des larmes de tristesse mêlée à de la joie. La tristesse d'avoir perdu son troisième père adoptif et la joie de savoir qu'il avait des amis comme Edd pour le soutenir dans les moments difficiles.

-Merci Edd.

-De rien voyons. Allez viens, on va se prendre une bière au bar. Mon heure de fermeture approche de toutes façons.

Jon suivit l'ami de feu son maitre, son ami, jusqu'au bar de l'auberge où ils prirent une pinte de bière chacun et se posèrent à une table pour causer un peu. L'aubergiste donna même à Fantôme une tranche de viande crue dans une assiette creuse que le loup dévora en moins de temps qu'il n'en faut pour le dir.

Quand ils eurent fini, Edd remit la clé de sa chambre à Jon qui le remercia encore et monta, suivi de Fantôme. Il comptait d'abord se reposer et dès le lendemain partir en quête d'information sur les déplacements du prince Gabriel. Au millieu de la nuit, il s'éveilla après avoir rêvé d'un roi et d'une dragonne aux écailles de saphirs et sortit par la fenêtre de l'auberge, saisissant Grand-Griffe (son épée) et accompagné de son fidèle Fantôme. Il se rendit aux abords de la ville et s'arrêta au pied d'un vieux chêne.

-Père...Que dois-je faire pour te retrouver ? Sais-tu seulement que j'existe ?

-Qui es-tu ? Qui suis-je ? Que suis-je ?

Depuis la disparition d’Elana et d’Anga, Saphira ne cessait de faire des allers-retours aux quatre coins de l’Alagaësia, à la recherche de quelconques indices lui permettant de retrouver sa fille et sa dragonnière. Mais rien ne l’avait guidé ni même envoyer sur une piste … dans cette histoire, Saphira se sentait seule, incroyablement seule. Elle savait qu’Eragon faisait également tout son possible, mais face à cette disparition ils ne pouvaient rien, et cela la rendait folle. Par principe, la dragonne bleue se devait de prévenir le prince Gabriel de l’avancé des recherches, aussi se dirigea-t-elle vers Aberon, la capitale du Surda et forteresse de la famille royale. Saphira vola jour et nuit pour atteindre la ville, sans ne jamais s’accorder une minute de repos ou presque. Elle était une dragonne ! Un dragon ne connaissance pas la faim, la soif ou la fatigue.

La dragonne aux écailles bleues arriva de nuit aux alentours de la capitale du Surda, où personne n’était censé l’attendre. Arrivée à l’improviste lui permettait de juger de la loyauté du pays libre … car dans son for intérieur, Saphira doutait des intentions de Gabriel et de son père, Orrin. A la mort de Galbatorix, Orrin avait eu l’audace de quémander des terres appartenant au nouvel empire d’Eragon, et son fils Gabriel semblait avoir hérité de sa soif insatiable de territoires. Saphira ne pouvait s’empêcher de se demander où tout cela finirait par les mener … ils semblaient avoir terminé une guerre pour en entamer une autre. La dragonne se posa non loin des rempares d’Aberon. Elle chassa de son esprit cette idée … pour le moment, la paix régnait toujours en Alagaësia, et Gabriel n’avait pas la force de déclarer une guerre. Ç’aurait été folie de déclarer la guerre à une armée qui possédait deux dragonniers … Repliant ses ailes membraneuses, Saphira observa la capitale du Surda avec gravité. Mais son intention fut rapidement attirée par une odeur d’humain mêlé à celle d’un carnivore, un chien ou un loup peut être. La dragonne posa ses yeux couleurs saphir en direction de l’odeur, et elle ne mit pas longtemps à trouver l’humain, qui était accompagné d’un loup au pelage blanc. Voyant que ni l’un, ni l’autre ne semblaient belliqueux, Saphira s’approcha doucement. Un sentiment de tristesse mêlé à la solitude émanait de l’homme … son visage ne disait rien à Saphira, pourtant elle avait une impression de déjà vu …

« Bonsoir, humain … tu sembles fort troublé »

Fit remarquer la dragonne aux écailles bleues. Pendant un instant, elle posa son regard sur le loup blanc … c’était la première fois qu’elle en voyait un aussi près d’un humain.

Alors que Jon était plongé dans ses pensées, il entendit du bruit non loin de sa position. Dans le même temps il sentit une conscience éfleurer la sienne, une conscience qui lui fit ressentir, sans qu'il en comprenne la raison, un profond sentiment de sérénité. Quel que soit l'être qui approchait de lui, il sentait qu'il ne représentait aucune menace pour lui. Intrigué il fit demi-tour sur lui-même et vit une chose qu'il n'aurait jamais cru voir, hormis dans ses rêves les plus fous. Face à lui se tenait une créature sortie des temps les plus anciens que le jeune homme connaisse, une créature sans doute plus d'une fois millénaire. Un dragon. Il entendit une voix féminine dans sa tête et comprit que ce n'était pas à un dragon qu'il avait à faire, mais à une dragonne.

-Bonsoir dragonne, mais je ne t'appellerai pas ainsi chaque fois que je m'adresserai à toi. Ce serait d'une grossierté qui ne me ressemble guère.

-Mon nom est Jon Snow, fils adoptif d'Albriech et de Baldor de Carvahal. Mais tu n'as qu'à m'appeller Jon, ce sera plus simple pour nous deux.

-Et toi, quel est ton nom ?

Il ne désirait pas parler de ses problèmes avec quelqu'un dont il ignorait jusqu'au nom. D'ordinnaire il n'était pas si loquace, avec la dragonne il ressentait quelque chose qu'il avait lui-même du mal à comprendre, une certaine proximité qu'il ne parvenait pas à s'expliquer. Il n'y avait aucune trace de peur dans son regard, il en ressentait une certaine forme mais avait appris à maitriser sa peur durant son entrainement, se remémorant l'un des idiomes de Syrio.

"-La peur est plus tranchante qu'aucune épée."

Ce n'était pas une peur panique qui s'était emparée de lui, c'était une crainte respectueuse envers un être de légende. Bien sot serait celui qui ne serait pas, même un peu, effrayé face à une créature légendaire comme celle dont il venait de faire la rencontre. Fantôme à ses côtés ressentait également de la peur mais comme lui parvenait à la maitriser un tant soit peu. Il était craintif mais ce serait qu'il ne le soit pas qui serait plus étonnant.

Il ne baissa le regard à aucun moment, car cela serait un aveu évident de faiblesse de sa part. Il soutenait le regard de saphir de la dragonne afin qu'elle voit clairement tout ce qu'il ressentait. Il n'était pas doué pour cacher ce genre de choses et quand il s'y essayait, systématiquement son regard le trahissait. Elle ressemblait à s'y méprendre à la dragonne qu'il lui arrivait d'appercevoir dans ses rêves. Qu'est-ce que tout cela signifiait ? En quoi lui, un simple être humain, pouvait-il être lié à une dragonne de quelque façon que ce soit ? Tout cela était fort troublant pour le jeune homme.

C'était bien la première fois que Saphira entendait le nom de ce Jon Snow. Elle ne pouvait malheureusement pas connaître les noms de tous les humains qui vivaient sur cette terre ... ç'aurait été une tâche bien trop importante et, dans un sens, futile. La dragonne bleue avait bien d'autres choses à faire comme, par exemple, veiller sur le bon déroulement du futur, chose qui était loin d'être facile ... Lorsque l'humain lui demanda qui elle était, la fierté de Saphir fut un peu froissée. Comment pouvait-il ne pas la connaître ? Elle était la dragonne du roi, celle qui l'avait aidé à rétablir la paix en Alagaësia et qui avait fait chuter le briseur d'oeufs Galbatorix de son trône ! Mais elle ne pouvait lui en vouloir ... Eragon et Saphira vivaient au-dessus des gens, dans un monde presque à part. Les gens avaient toujours cru que les dragons n'étaient qu'une légende, jusqu'à ces dernières années. Et même encore aujourd'hui, beaucoup était les paysans qui n'avaient jamais vu de dragon, de près ou de loin. Ce Jon Snow faisait peut-être partis de ces gens-là ...

« Tu ne me connais donc pas, Jon Snow ? Je suis Saphira Ecailles Brillantes, fille d’Iormûngr et de Vervada, dragonne d’Eragon et protectrice du royaume »

Déclara Saphira, non sans une pointe de fierté. Pour paraître moins impressionnante, la dragonne bleue replia ses longues ailes membraneuses.

« J’ignorai qu’Albriech et Baldor avaient eu un fils adoptif » affirma-t-elle « J’ai combattue à leurs côtés au temps de la guerre contre le Briseur d’œufs. J’espère qu’ils se portent bien »

Ajouta la dragonne. Saphira avait connu bien des gens de Carvahall, grâce à Eragon ou encore à Roran, son cousin. La guerre avait fait d’eux des alliés et des héros victorieux, qui appréciaient aujourd’hui le calme d’une paix bien mérité. L’intension de Saphira se tourna de nouveau vers le loup blanc.

« Tu as là un bien joli loup, Jon Snow, il me rappelle les bannières du nord. Que fais-tu si loin de ton pays ? »

Demanda Saphira, curieuse.

Jon sentit que le fait qu'il lui demande son nom avait quelque peu froissée son interlocutrice, il en fut sincèrement désolé et s'en excusa auprès d'elle. Hormis ce que lui avaient raconté ses deux pères adoptifs il ne connaissait quasiment rien des dragons. Elle se présenta à lui sous le nom de Saphira Ecailles Brillantes, fille d'Iormungr et de Vervada, dragonne d'Eragon et protectrice du royaume.

- Je suis enchanté de faire ta connaissance, Saphira écailles brillantes.

Ainsi donc, voilà comment ses deux pères adoptifs savaient ce qu'ils savaient des dragons, ils connaissaient Saphira et avaient combattus à ses côtés et à ceux du roi Eragon durant la bataille contre le roi félon Galbatorix. Ils lui en avaient quelque peu parlé mais il avait cru, sottement, qu'ils lui racontaient ces histoires pour paraitre plus impressionnants à ses yeux. C'était simplement la vérité qu'ils lui avaient dite. Il se sentit particulièrement stupide sur le moment.

- La dernière fois que je les ai vus ils se portaient bien. A vrai dire, cela fait quatre ans que je n'ai pas eu de leur nouvelle. Depuis mon entrée dans l'armée libre sous les ordres du général Roran.

Lorsqu'elle s'intéressa de nouveau à Fantôme, ce dernier se retient d'émettre un seul son qui pourrait indisposer la dragonne d'une façon ou d'une autre. Jon décida de répondre à la question de son interlocutrice à propos du loup qui l'accompagnait depuis ses plus jeunes années, avec qui il avait grandi et mûri, celui avec qui il partageait tout.

- J'ai trouvé Fantôme il y a bien longtemps, pour moi, et depuis nous ne nous sommes jamais séparés. Je m'en souviens comme si c'était hier, c'était à l'occasion d'une chasse dans la forêt jouxtant Carvahal. Il venait de perdre sa mère et se retrouvait donc seul dans la nature. Il n'aurait pas survécu ainsi deux nuits et je n'avais pas le coeur à le laisser ainsi en sachant cela. C'est pourquoi j'ai préféré le prendre avec moi. Depuis on ne s'est jamais vraiment quittés.

- Quant à la raison de notre présence ici, je suis en mission pour le compte de l'armée libre. Une mission qui m'a été confiée par le général Roran en personne. Lui aussi tu dois le connaitre.

Tout son respect et son admiration pour le général de l'armée libre transparaissait dans ses propos. Il aurait fallu être aveugle et sourd pour ne pas le comprendre. Du début à la fin, il avait été parfaitement sincère avec la dragonne. Sur aucun point de ce qu'il lui avait dit il n'avait menti. Il avait simplement résumé afin de ne pas lui faire un roman qui l'agacerait sans doute plus qu'autre chose. Il préférait de loin lui apporter des réponses claires, précises et concises, comme à tous ses interlocuteurs.

Saphira écouta avec attention le récit de Jon Snow. Depuis sa naissance, elle avait eu vent de beaucoup histoires, mais jamais de semblable ne lui avait déjà été conté. La dragonne avait entendu bien des choses concernant les hommes du nord, des légendes et des mythes, si bien que, parfois, elle ne reconnaissait plus dans les dires des paysans sa région natale, où elle et Eragon avaient grandis. Il allait falloir qu'ils y retournent, un de ses jours ... trop de choses avaient changés depuis la mort du Briseur-D'oeufs.

Lorsque l'humain mentionna le nom de Roran, un étrange sentiment envahie Saphira. Le cousin d'Eragon lui manquait ... en fait, le passé en lui-même lui manquait. Les garçons qu'elle avait connu étaient devenus des hommes, qui avait désormais des responsabilités, et chacun leurs fardeaux. Malgré cela, une chose chagrina quelque peu la dragonne bleue : pourquoi Roran avait-il envoyé un de ses soldats au Surda ? L'Armée Libre n'avait rien à faire sur les terres du roi Orrin et du prince Gabriel ... si cela se savait, bien des problèmes apparaîtraient. Depuis la mort de Galbatorix, les relations entre le Surda et l'Empire était relativement froides ... deux humains avaient été choisis là-bas pour être dragonnier - Gabriel et Elana - mais au final, peu de choses maintenait la loyauté des Terres Libres envers le Nouvel Empire. Cette fragile alliance dérangeait un peu Saphira, mais elle n'y pouvait rien.

« Oui, en effet, je connais Roran » affirma Saphira « Je suis étonnée de savoir qu’il t’a envoyé ici, sur les terres du Surda. Ces terres n’appartiennent pas à Eragon, et l’Armée Libre n’a rien à y faire » expliqua la dragonne aux écailles bleues

Mais elle se doutait que Snow ne pourrait donner de réponses à ses interrogations. Seul Roran pouvait répondre de ses actes, et Saphira ne manquerait pas d’aller le questionner la prochaine fois qu’elle le croiserait. Pour lors, c’était avec Jon Snow qu’elle était, et autre chose la dérangeait quelque peu : toujours au fond d’elle-même, elle avait cette impression de déjà vu, comme si son chemin avait déjà croisé celui de ce jeune homme. Pourtant, elle était persuadée que c’était bien la première fois qu’elle voyait ce soldat …

La dragonne huma l’air un moment … il était tard, et elle devait se hâter si elle voulait voir Gabriel.

« Prend garde à ne pas te faire prendre ici, Jon Snow. Tu serais fort mal accueillis si l’on apprenait que tu viens de la part du Nouvel Empire »

L’avertit Saphira

La fière et altière dragonne écouta avec attention le récit que lui fit Jon pour répondre à sa précédente question. Il remarqua très clairement de l'inquiétude dans le regard de la dragonne grâce à la capacité d'observation qu'il avait acquise durant les années de son entrainement avec Syrio. Le général Roran lui avait clairement exposés les risques de sa mission avant de la lui confier et il les avait acceptés en acceptant d'accomplir cette mission, ce n'était pas maintenant qu'il allait revenir sur sa décision bien qu'il comprenne totalement l'attitude de la dragonne. Ce n'était après tout pas à elle qu'il avait prêté serment mais à l'armée libre, donc à Roran.

- Je te remercie de ta mise en garde Saphira écailles brillantes, et je prend acte de tes inquiétudes que je transmettrai au général Roran quand je le reverrai.

- Je doute fort qu'il m'aurait confié une telle mission s'il n'avait aucune crainte à avoir au sujet de ce royaume, ou bien de ceux qui y vivent.

Au fond de lui également, le jeune homme sentait son lien étrange avec la dragonne, mais demeurait incapable d'en déterminer la nature avec certitude. Hormis dans ses songes il n'avait jamais rencontrée la dragonne, bien qu'avec ce qu'il était en train de vivre il commençait à douter qu'il ne s'agisse que de simples rêves. Il voulut interroger la dragonne mais se douta qu'elle n'en saurait probablement guère plus que lui. Il se décida tout de même à lui poser la question, sans oser jamais il n'aurait de réponse à ses interrogations.

- Je ne sais pas pourquoi, mais depuis que nous nous sommes rencontrés j'ai comme l'étrange impression qu'il y a un lien entre nous, mais je n'arrive pas à en comprendre la nature.

Fantome se rapprocha de son ami et Jon s'assit au pied du chêne. Il caressa affectueusement la tête du loup albinos, ce à quoi il répondit par une léchouille à la main. Le lien entre Fantome et lui il le connaissait et le comprenait parfaitement, il aimerait pouvoir en penser autant de celui qui le liait à Saphira. Il n'avait à aucun moment complètement quittée la dragonne du regard.